La Réponse - le résumé

Soumis par SuperB le mer 03/04/2024 - 13:24
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Le bruit de la pluie battante sur le toit du wagon ne parvenait ni à couvrir le grondement du train qui se préparait à démarrer, ni le crachat des armes quantiques qui abattaient leur quota quotidien de civils. Le train s’ébranla enfin, et, alors qu’ils quittaient l’enceinte d’Orlova-Bohumin les 6 individus de la voiture 4B ne purent s’empêcher de se remémorer les évènements tragiques qui les avaient conduits à ce point.

Il aurait été bien difficile pour une personne de l’extérieur de comprendre ce qui avait pu conduire ces étranges personnages à travailler ensemble. De la logisticienne de l’économat, au syndicaliste ou à l’agent de liaison en passant par un scientifique, une garde noire et un photographe, rien de semblait les lier. Rien, si ce n’est un doute quant au bien-fondé des règles du Diktat et un espoir partagé, brillant comme un morceau de résine illuminant la nuit. L’espoir de pouvoir faire changer les choses. C’est peut-être cet espoir commun qui avait conduit Minar, de la cabale Dykovienne, à envoyer ce groupe hétéroclite pour une première mission : ils devaient prendre contact avec un certain Alémar Host, qui avait transmis quelques temps auparavant un rapport pour le moins étrange à la cabale. Ce rapport, comme le découvrait plus tard Kubik Oktobar, spécialiste des radiations, faisait état d’une guérison miraculeuse d’un travailleur exposé à des doses de radiation normalement mortelles. Et les miracles étaient suffisamment rares et intrigants pour que la cabale prenne le risque d’envoyer 6 nouvelles recrues en mission d’enquête.

la flamme la plus brillante projette l’ombre la plus sombre

Si le voyage jusqu’à l’enclave se déroula sans difficulté, les agents comprirent rapidement que leur tâche serait ardue. En effet, le bloc d’Orlova était depuis plusieurs semaines dans un état de quasi-guerre civile suite à la grève de milliers de travailleurs. Dominik, en bon syndicaliste, avait déjà montés des mouvements de grèves, et en avait cassés d’autres, mais il n’avait jamais rien vu de cette ampleur. Leur parcours pour rejoindre « l’Achillée », le contact local de la cabale, s’avéra périlleux, tant en raison des contrôles répétés de leurs papiers falsifiées que des multiples émeutes sanglantes éclatant quotidiennement dans la ville. Lors de contrôles un peu trop poussés, le statut de Petra Kantor, garde noire de son état et de Jana Alena Novak, logisticienne de l’Economat, leur fut d’un grand secours à plusieurs reprises. Par ailleurs, lorsqu’ils durent fuir dans les ruelles ou éviter les affrontements, Hynek Novotny parvint à les mener à bon port, malgré le dépaysement total qu’impliquait pour lui le fait de guider un groupe inexpérimenté dans une ville et non des camarades entrainés en pleine nature.

Lorsqu’ils parvinrent à le rencontrer, l’Achillée leur apprit une terrible nouvelle : Alémar Host avait été arrêté quelques jours auparavant et croupissait dans la prison du bloc, Hermanice. De plus, la Polisec devait arriver dans les prochains jours en ville afin d’interroger les prisonniers. L’adage « on ne cache rien à la Polisec » n’étant pas connu pour rien, le groupe ne disposait que d’un bref délai pour faire évader Alémar Host, avant qu’il ne révèle non seulement le contenu de son rapport, mais aussi l’identité des membres de la cabale y compris les leurs, les condamnant tous par la même occasion. Une collecte effrénée d’information commença alors afin de mettre en place un plan :

Jana Alena, accompagnée par Bohdan Gross parvint à rencontrer l’ancien directeur et architecte de la prison, Adrian Verner, actuellement directeur de l’Edification. Une photo bien cadrée, avec le nouveau directeur de l’Edification leur permis d’obtenir subtilement un plan sommaire du bâtiment. Ils purent également lui soutirer des informations sur le quartier de sécurité dans lequel Alémar Host était retenu.

Dominik et Kubik de leur côté rencontrèrent des représentant principaux des syndicats locaux, et plus particulièrement Thomas Steiner, ami de Dominik et leader principal des émeutes, qui semblait prêt à lancer une attaque sur la prison. A la suite de cela, ils furent contraints de faire disparaitre quelques témoins gênants dans un bar de la ville lors d’un incident qu’il vaut mieux passer sous silence.

D’autres recherches permirent au groupe d’évaluer la sécurité de la prison, aboutissant au constat de l’impossibilité d’une attaque frontale. Ils eurent également vent d’un individu s’étant échappé de la prison de Hermanice, un certain Vis Da Rold.

Les membres du groupe se mirent alors en route pour le quartier de Karst, une zone de non droit dont les habitants ne sont même pas considérés comme des citoyens et sur laquelle règne la pègre locale, avec à sa tête Mann Gustav. Comme ils l’avaient pressenti, et grâce à une habile négociation de Bohdan, ils purent rapidement trouver un terrain d’entente avec le parrain. Celui-ci les aidera à retrouver la famille de Vis Da Rold et fournira armes et explosifs aux ouvriers prêts à attaquer la prison. En contrepartie, Mann Gustav espérait faire sortir certains de ses hommes emprisonnés, avant leur inévitable interrogatoire par la Polisec.

Bien qu’effrayée initialement, l’épouse de Vis Da Rold accepta rapidement de laisser les membres du groupe rencontrer son mari. Celui-ci se cachait dans les couloirs des hypogées depuis son évasion, et malgré sa contamination évidente par la noirceur, il semblait avoir gardé toute sa raison. En échange de son aide, il exigea que le statut de citoyen soit rendu à sa famille, bien conscient que son temps était compté. Au prix de nombreuses dépenses et démarches, Jana parvint à s’offrir les services d’un faussaire réputé, qui put fabriquer les documents demandés, réhabilitant ainsi le statut de la famille Da Rold.

Le temps pressait, et la vieille de l’arrivée de la Polisec, les 6 membres du groupe, accompagnés par des hommes de main de Mann Gustav pénétrèrent dans la prison par l’accès que leur avait fournis Vis Da Rold. Une attaque simultanée par les émeutiers avait été planifiée afin de distraire les gardes. Alors qu’ils étaient sur le point de pénétrer dans la prison, le groupe se retrouva nez à nez avec un petit groupe armé, mené par Videk Lovidek, un gangster local. Bien qu’il soit en mauvais termes avec Mann Gastav, il accepta de joindre ses forces à l’attaque de la prison car il partageait le même objectif : faire sortir des hommes à lui possédant des informations compromettantes à son sujet.

L’attaque de la prison se transforma vite en bain de sang, les prisonniers libérés au fur et à mesure de la progression des assaillants finissant par submerger les gardes sous leur nombre. Cependant, un son vint couvrir les coups de feu et les hurlements qui raisonnaient dans l’enceinte de la prison : le rugissement des sirènes d’alarme, suivi du grondement caractéristique des batteries de défense du mur extérieur. Dans le chaos général, cette information glaça le sang à la fois des gardes et des insurgés, mais la lutte pour la survie l’emporta vite sur les questions qu’ils auraient pu se poser. Alors que le poste de garde du 5ème niveau, étage où était retenu Alémar Host fit par tomber, le bruit des défenses extérieures cessa et, peu de temps après, un craquement horrible de métal froissé retenti, rapidement suivi par des cris d’agonie et de douleur au rez de chaussée de la prison. Fonçant vers la cellule d’Alémar Host, le groupe fut tout à coup immobilisé par un froid glacial et une épaisse obscurité s’abattit sur la prison. Des créatures cauchemardesques apparurent devant la cellule. Elles étaient humanoïdes, grande et filiformes, la peau pale et portaient des masques couvrant leur visage. Tout leur être hurlait aux humains présents de fuir et les rares tentatives pour les stopper se conclurent par la mort douloureuse et brutale de ceux qui se dressaient sur leur chemin. Elles arrachèrent la porte métallique de la prison d’Alémar Host d’un simple geste. Celui-ci les supplia « ce n’est pas moi, elle m’a obligé à le faire » sans que cela ne semble avoir le moindre impact sur elle. Les créatures s’emparèrent de l’homme avant de disparaitre aussi soudainement qu’elles étaient apparues. Le petit groupe venu libérer Alémar, en état de choc, parvint à sortir de la prison par la porte principale qui avait été comme enfoncée par un cataclysme. Sur la place du marché, devant la prison, un spectacle macabre les attendait : des centaines de corps gisaient là, les bleus de travail des ouvriers se mélangeant aux uniformes des gardes noirs dans une mer de sang et de viscères.

D’un commun accord, le groupe décida de s’abriter dans la planque que leur avait fourni l’Achillée. Des heures durant, les tirs, les ordres et les cris se succédèrent en une longue litanie de mort avant qu’un calme relatif et surement trompeur ne n’installe dans les rues désormais dévastées des quartiers populaires. Plusieurs quarts passèrent avant que les membres du groupe ne tentent de ressortir de leur cachette. Certains étaient recherchés, d’autres blessés et tous savaient, sans avoir besoin de l’évoquer à voix haute, que les événements de ces derniers jours les marqueraient à jamais. Pourtant leur mission n’était pas terminée. Ils cherchaient désormais à en apprendre plus sur Alémar Host et sur ce qui aurait plus le relier aux créatures de cauchemar qui l’avaient enlevé.

Ils entreprirent donc de nouvelles recherches centrées sur les lieux fréquentés par Alémar Host : l’usine dans laquelle il officiait ainsi que son domicile.

Chez Alémar, ils trouvèrent différents éléments intriguant : une copie du rapport envoyé à la cabale accompagné d’une note dans laquelle Alémar faisait état d’un déplaisir évident de voir débarquer 6 agents de Prague pour venir discuter de ce dossier en personne, alors qu’il espérait juste une contre-expertise. Par ailleurs il apparut qu’Alémar avait employé Videk Lovidek peu de temps auparavant pour une affaire. Le contact avec le bandit semblait avoir lieu par l’intermédiaire d’une femme dans un bar, La Lichette.

La visite de l’usine leur apporta plus de questions que de réponses. C’était à cause d’un accident dans cette usine, quelques semaines auparavant, que les grèves et les révoltes avaient débutées à Orlova : un lourd récipient d’acier en fusion s’était détaché, broyant 8 travailleurs dans sa chute. Cependant, en examinant plus précisément la chaîne, il apparut très vite à Oktobar que cet accident relevait en réalité du sabotage, voire du meurtre camouflé. Quelques rapides recherches sur les hommes morts écrasés révélèrent d’étranges informations : 2 des hommes étaient connus sous le nom des frères Potemkine : 2 hommes de main apparemment sans scrupules et violents, prêt à tout, contre rémunération adéquate. De plus, Jana identifia rapidement leur lieu de résidence : un immeuble d’un beau quartier, normalement complètement inaccessible à d’honnêtes (et pauvres) ouvriers.

Alors qu’ils se préparaient à quitter les lieux, ils repérèrent un homme qui semblait les épier. Grâce à sa formation militaire, Petra eu tôt fait de l’attraper et de le faire parler. L’homme était un codétenu d’Alémar Host, et accessoirement un tueur récidiviste. Alémar lui avait confié un message à donner à une certaine Dagmara avant d’être enlevé : « Dagmara, la situation devient très compliquée à mon niveau mais soyez fière, le projet va pouvoir s’accélérer. J’ai découvert la clef d’activation. Elle se trouve au 27ème niveau de l’Hypogée Ctyri, porte 13 faubourgs Richwald de l’enclave d’Orlova. Prenez-la et détruisez tout le… ». Le meurtrier avait attendu son contact des jours durant, mais ne voyant personne venir, il comptait maintenant négocier cette information contre un échappatoire de l’enclave. Devant l’absence totale de remord vis-à-vis de ses crimes, Bohdan l’envoya à une mort certaine dans Karst.

Une partie du groupe se rendit au domicile des frères Potemkine, tandis qu’Oktobar et Dominik restaient cachés à la planque, étant activement recherchés. Là-bas ils rencontrèrent la famille des 2 hommes qui semblait en grandes difficultés financières. Tandis de Jana et Petra occupaient les épouses des frères Potemkine, Hynek remarqua qu’un des enfants semblait cacher quelque chose. Celui-ci lui raconta qu’il avait écrit une lettre pour son père à destination d’Alémar Host. Il ne comprenait pas tous les détails mais il se souvenait globalement du texte : « nous vous avons vu l’autre soir sortir de Rolnika avec un colis, mais nous sommes prêts à tenir notre langue en échange d’un dédommagement ». Différentes pièces du puzzle commencèrent à s’agencer : de toute évidence Alémar Host avait voulu faire taire les frères Potemkine, et pouvait très bien avoir engagé Videk Lovidek pour provoquer un « accident » à l’usine.

Le groupe se rendit ensuite à la Lichette, après avoir à nouveau évité de justesse les contrôles. Sur le chemin ils réussirent à se renseigner sur Rolnika, un orphelinat d’un quartier voisin. La Lichette n’était de tout évidence pas n’importe quel bar : la décoration était sophistiquée, les lumières brillaient et nourriture et boissons y étaient servies à profusion, pour peu qu’on en ait les moyens. Dominik parvint à rencontrer Rose, le contact d’Alémar à la Lichette, mais elle ne lui apprit rien de capital. Cependant, il était clair qu’elle connaissait Videk Lovidek et Alémar et qu’elle craignait ce dernier.

Sur le trajet du retour, le groupe fit un détour par Rolnika. Ils réussirent à pénétrer dans l’orphelinat, prétextant un contrôle de l’Economat dans le but de remplacer les ouvriers manquants. Sur place ils entendirent parler d’un enfant disparu, Hugo. Son ami, qui était le dernier à l’avoir aperçu expliqua au groupe qu’ils sortaient régulièrement soigner les habitants du quartier, qui le surnommaient « Odpoved ». Il sembla rapidement clair qu’Alémar avait enlevé cet enfant et que ses pouvoirs de guérison, s’ils étaient avérés, pouvaient expliquer l’étrange rapport reçu par la cabale. Un tour rapide dans le quartier ouvrier autour de l’orphelinat confirma les dires de l’enfants : Hugo était connu de tous les locaux pour ses pouvoirs de guérisons.

Après un repos bien mérité, le groupe décida de se rendre à l’Hypogée, à la recherche de la fameuse clef d’activation dont parlait Alémar dans sa note. Ils durent user de toute leur ruse pour tromper la méfiance des gardes noirs localisés à l’entrée de l’hypogée, mais furent finalement autorisés à passer. Alors que l’ascenseur de métal les emmenait en grinçant dans les profondeurs de la Terre, une pensée commune les frappa : aucun d’entre eux n’avait jamais visité d’Hypogée, tout ce qu’ils en savaient leur avait été appris par le Diktat. Plus étrange encore, aucun d’autre ne se souvenait avoir entendu parler de la construction d’une Hypogée. Tout au plus avaient-ils vu de nouvelles entrées être créées pour rejoindre un hypogée déjà existant.

Après un temps qui leur paru interminable, ils arrivèrent enfin au 27ème niveau. La chaleur étouffante les frappa et même temps qu’une odeur de moisissure rance. Les couloirs de l’hypogée étaient plongés dans l’obscurité, mais l’omniprésence de la moisissure leur permis rapidement de constater des traces de pas sur le sol. Ils n’étaient pas les seules personnes à être passées par là récemment. En marge des traces de pas et de pattes et guidés par Hynek, ils parvinrent finalement à trouver la porte 14. Un coup de fusil eu tôt fait de faire sauter le cadenas, leur révélant une petite pièce. La présence d’une cage dans un coin de la pièce leur sauta d’abord aux yeux : la cage était de taille à contenir un homme et la présence de différents fluides sur le sol ne laissait aucun doute quant au fait qu’elle ait été utilisée. Oktobar repéra également une petite boite en bois posée sur un bureau à l’opposé de la pièce. En l’ouvrant il découvrit une pièce métallique triangulaire d’une dizaine de centimètre de long sur laquelle différents motifs géométriques s’entrecroisaient. Le scientifique resta médusé devant la complexité de cette pièce et ne put s’empêcher de penser qu’elle n’avait pas pu être fabriquée par l’homme, ou du moins pas avec les connaissances actuelles. En fouillant le bureau, il trouva un morceau de papier sur lequel Alémar avait noté un rendez-vous à la Lichette, à une date proche de l’enlèvement d’Hugo ainsi qu’un journal, contenant un compte rendu de certains interrogatoires qui s’étaient déroulés dans cette pièce :  de toute évidence, Alémar avait enlevé des personnes et les avaient séquestrées dans cette pièce sordide afin d’obtenir des informations sur Hugo.

Bien qu’Hynek insista pour remonter au plus vite, le reste du groupe était trop intrigué par les traces de pas trouvées et insista pour explorer les couloirs. Cette expérience ne fut pas vraiment plaisante, comme le décrivit plus tard Hynek dans son journal :

« Moi, Hynek, je suis un gars de la campagne. J’aime les choses simples, visibles, sans artifice. Pour le coup, je suis très mal servi. Ce n’est pas faute de l’avoir dit plusieurs fois, après notre petit tour dans cette pièce glauque de torture et d’enfermement, nous aurions dû rentrer sans demander notre reste. La curiosité est une qualité appréciable lorsqu’elle s’applique avec discernement et circonspection. Mais là, nooon, bien sûr, avançons gaiement dans l’inconnu avec audace, ce pauvre Hynek, il n’y connait goutte. C’est pas comme si c’était mon job, les enfants, hé, oh ! Traitez-moi de vieux bouseux. Ils sont fous, ils sont tous fous. Même le seul compère avec un tant soit peu de bouteille dans ce groupe, le savant fou… Eh ben, il est fou.

Pourtant, tout mon instinct me hurle de rebrousser chemin. Cela fait bien vingt minutes que nous avançons à tâtons dans les couloirs de l’Hypogée. Le sol est sale, indistinct, hormis les quelques traces de pas et de … griffes. Oui je suis certain qu’il s’agit de griffes. Et le genre de créatures qui s’affublent de pareil appendice, eh bien, de là d’où je viens, il vaut mieux les éviter. Mais non... Pauvres fous, tous autant qu’ils sont. C’est comme l’histoire de la petite souris et du…. Non, mais là, pas le temps pour ça.

J’ai l’impression que mon cœur remonte dans ma trachée à grands coups de petits marteaux, j’en ai les orteils qui flageolent. A la faible lumière dispensée par le Lumen de notre ami photographe, je sens les murs recouverts d’une mousse jaunâtre, comme du pus s’écoulant d’une plaie faisandée. Le silence n’est rompu que par de faibles chuintements rythmés, est-ce l’écho des digesteurs des étages supérieurs ? Mon palpitant qui s’affole ? Ce ne serait pas plutôt un sifflement strident, en fait, me vrillant l’oreille que j’ai fort sensible, et augmentant d’un cran la tension s’accumulant dans toutes les fibres nerveuses de mon être.

Alors que nous progressons, certes, avec précaution à défaut de prudence, nous percevons un faible vagissement, une plainte émise d’une voix chevrotante : « à l’aide »… et pas qu’une fois ! Bon sang, c’est sûr, il y a quelqu’un dans cette antichambre de l’Enfer. Et quelques pas plus loin, au détour du couloir, la masse indistincte qui gît affalée contre le mur, éclairée par le Lumen tremblotant… Il s’agit bien d’un homme, oui, mais dans quel état !! On dirait que son corps a déversé ce qu’il contenait de fluides corporels, une flaque sombre et malodorante s’étale grandissante sous ses entrailles… Du fiel ?

N’écoutant que son cœur, l’une des filles de l’équipe se précipite à son chevet. Pas bon, ça, pas bon, première erreur, quelle naïveté ! Le pauvre type est manifestement quasi cané.

Redoutant un coup fourré, j’avance de quelques pas plus loin dans le couloir, tous les sens aux aguets. Et c’est là que j’aperçois l’éclat rouge d’yeux très clairement bestiaux, avant même d’entendre la créature émettre un grondement guttural fort peu amène. Le faisceau fugace du Lumen brandi révèle avec effarement une sorte de canidé monstrueux, puissant, très très noir aussi, avec une mâchoire tout aussi impressionnante et comme des veines cuivrées qui semblent parcourir tout son corps tendu vers l’attaque. Pas bon, ça, pas bon DU TOUT !!

Je lève immédiatement le canon de mon revolver vers cette… chose, que les légendes de ma campagne ne font que vaguement décrire sans jamais avoir eu la certitude que quelqu’un en est revenu vivant pour le raconter de première main. Le coup s’apprête à partir quand une autre voix discordante et railleuse, à l’opposé du couloir, nous apostrophe presque avec délectation : « eh bien, eh bien, qu’avons-nous là, mon petit Bichon, de la chair fraîche à se mettre sous la dent ? » Le Lumen du photographe effaré révèle ce qui reste d’un homme obèse, difforme, d’une laideur et d’une saleté repoussantes, vêtu d’un tablier déchiqueté ayant connu des heures plus glorieuses et, je l’espère pour lui, une blanchisseuse plus consciencieuse. Il est armé d’un couteau de boucher à la lame constellée de tâches douteuses et d’un crochet fort pointu. Mais le pire, ce sont ses yeux, petits, sournois, moqueurs, et pourtant d’un noir insondable et terrifiant.

Mon cœur opère une brusque chute vertigineuse dans mes orteils. Alors que je me retourne avec toute la vivacité que me confère mon instinct de survie, la créature dénommée Bichon bondit soudain à une hauteur proprement impossible pour me dépasser à une vitesse vertigineuse et refermer sa mâchoire dévastatrice sur ma collègue au grand cœur ! Je n’ai rien pu faire !!!

Je vous l’avais bien dit ! Mais nooon, on n’écoute jamais Hynek, ce vieux bouseux… Fous, ils sont tous fous ! Et foutus, j’en ai la certitude ! Couic, la petite souris ! »

Malgré tout, le groupe réussit à éliminer le boucher monstrueux et son molosse à coup d’armes quantiques et de barre de métal avant de remonter le plus vite possible à la surface.

Ils se rendirent ensuite à la Lichette dans l’objectif de découvrir avec qui Alémar avait rendez-vous. Leurs fonds étant au plus bas, ils durent menacer le barman pour obtenir des informations : il leur avoua qu’il avait vu Alémar en compagnie d’une certain Dvere. Jana, Petra et Dominik parvinrent à rencontrer ledit Dvere qui s’avéra être un passeur, capable de faire sortir des gens de l’enceinte d’Orlova. Dans un premier temps, le passeur se refusa à tout commentaire sur son éventuelle implication dans la disparition d’Hugo. Cependant, Petra remarqua que l’homme semblait atteint par la noirceur. Il suffit alors de lui parler des pouvoirs de guérison d’Hugo pour que l’homme revienne sur sa décision et accepte de partager ses informations en échange d’une chance de rencontrer l’enfant. Il leur apprit qu’il avait emmené Hugo à Olomoc et qu’il l’avait laissé à 2 paysans locaux et Dominik promit de lui faire rencontrer Hugo une fois qu’ils l’auraient retrouvé.

A cause des récents évènements dans le bloc d’Orlova, Olomoc était actuellement impossible à rejoindre par le train. Cependant, grâce aux contacts de l’Achillée, le groupe obtint un ticket vers la campagne avoisinante.

Trop de questions demeuraient sans réponse, tant sur Alémar Host que sur le monde qui les entourait et qu’ils découvraient bien plus mystérieux et inquiétant qu’ils ne le soupçonnaient :

  • Qui est cette Dagmara pour qui Host semble travailler et pourquoi ne s’est-elle pas présentée au rendez-vous qu’il a tenté de lui donner ?
  • Qu’a-t-elle pu obliger Alémar à faire qui aurait justifié son enlèvement par les créatures venues de par-delà le mur ?
  • La pièce triangulaire retrouvée est-elle bien la clef d’activation dont parlait Alémar et qu’active-t-elle ?
  • Quel rôle Hugo et ses pouvoirs jouent-ils dans ces évènements : Alémar a-t-il tenté d’éloigner Hugo de quelque chose ou bien l’a-t-il envoyé à Olomoc pour une raison spécifique ? Dans les 2 cas est-ce que Dagmara est au courant de l’existence d’Hugo ?
  • Quelles sont les limites du pouvoir d’Hugo : soins des radiations, de la noirceur, des affections physiques, psychologiques ?
  • Que se passe-t-il dans les Hypogées : elles ont été construites longtemps auparavant, mais par qui et comment ? pourquoi le niveau 27 était dans un tel état de délabrement si les hypogées sont si vitales pour la survie des enclaves ?
  • Il semblerait qu’une communauté de personnes contaminées par la noirceur vive dans les Hypogée, se nourrissant d’autres humains : A moins qu’ils soient au courant, comment toutes ces disparitions ont-elles pu passer inaperçues aux yeux des différents ministères ? Si l’on suppose que les autorités sont au courant, pourquoi tolérer, voire entretenir cet état des choses ? Cela est-il dû à un manque de moyen pour « nettoyer » les hypogées ? A un niveau de menace trop important : communauté très nombreuse ou trop difficile à traquer si tous les hypogées sont reliés ? Enfin, ont-ils un intérêt à l’existence de cette « communauté » ?
  • Enfin qu’est-ce que la noirceur et quels sont ses effets en dehors d’une dégradation physique ? On peut visiblement en guérir et tous ceux affectés qui ont été rencontrés ont visiblement gardé un certain niveau de lucidité : que ce soit Vis Da Rolad, Dvere ou dans une moindre mesure le boucher. Visiblement elle peut aussi infecter les animaux comme le chien du boucher.

La brusque fermeture des volets du train, indiquant le passage du mur, interrompit brutalement les pensées des membres du groupe. La machine les emmena au loin, laissant derrière eux les horreurs de l’enclave ainsi qu’une partie de leur innocence.