Le Siège de Cthonia - 8e Compagnie des Imperial Fists [Ravenclaws]

Valdemar Kieergrad, sénéchal de la 8e Compagnie des Imperial Fist, était tendu. La colère sourde de son interlocuteur palpable même au travers du projecteur holographique.

"Le plan est parfait. La zone a été minée, les traitres sont arrivés exactement là où je l'avait prévu."

Une pause. Son interlocuteur le dévisage de toute sa hauteur, laissant le silence alourdir le poids de ses mots.

"Sachant ceci, Sénéchal - l'individu poursuit, le ton affable dissimulant à peine le venin suintant derrière le titre militaire -, expliquez-moi comment vous avez perdu l'intégralité d'un groupement d'assaut de la VIe et l'une de nos propres colonnes blindées ?"

Valdemar se redresse légerement. Il n'aime pas le Seigneur-Castellan. Comme lui, Evander Garrius est un vétéran des guerres d'unification, mais un vétéran à la renommée sombre. Des rumeurs prétendent que l'esprit du tyran à qui il a dérobé son gantelet énergétique aurait déteint sur lui en deux siècles... Valdemar est prêt à croire ces superstitions.

"Seigneur-Castellan, nous sommes toujours dans les paramètres de tolérance que vous avez établi pour la poursuite de votre plan. Les Traitres de ce groupe semblent menés par des vétérans qui ont rallié leurs forces et mené cette percée, mais ils sont encore dans la zone de combats et n'en sortiront pas vivants."

Evander Garrius toise le sénéchal. Tous deux sont engoncés dans des armures Cataphractii mais Garrius domine Valdemar d'une bonne tête malgré tout.

"Il vaudrait mieux, Valdemar. J'ai suivi le rapport d'engagement, et vos méthodes laissent à désirer. Votre poursuite d'une guerre honorable est admirable, mais Rogal Dorn m'a donné les pleins pouvoirs sur Cthonia et, en son nom, j'exige des résultats.

L'Alpha Legion et ces... Space Wolves renégats aiment se terrer dans la moindre ruine pour  se protéger de notre colère. Des unités du 472e Necromunda, de la 12e Compagnie et de la Thagmata Graia sont à proximité. Récupérez la puissance feu dont vous avez besoin auprès d'eux et vitrifiez la zone. Ensuite, et ensuite seulement, vous aurez ma bénédiction pour aller chercher la tête de leurs chefs."

Un escadron de Thunderbolts alliés passa en trombe au-dessus du champ de bataille où un calme trompeur était descendu, comme une chape de plomb. Le capitaine d'assaut Reinhardt Valens surveilla les environs. Les épaves fumantes d'une partie de sa colonne blindée, les armures bleues nuit étendues à perte de vue, une mer sombre ponctuée d'étoiles jaunes là où des guerriers de la VII était tombés.

Ils se comportent comme des bêtes sauvages. Ils chassent en meute et sont mis en déroute à la première trace de résistance. Pathétique. Si tous les Traîtres sont tombés aussi bas, ce n'est plus une guerre que nous menons mais bien une extermination.

Le crissement de bottes de céramiques sur les gravats le tira de sa courte introspection. Markus Toppenheimer, un champion du Premier Chapitre s'approchait, trainant dans son gantelet la forme démembrée et ensanglantée d'un marine de la VIIIe Légion portant une armure exceptionellement ouvragée. Reinhardt pivota pour faire face au champion et le salua comme le voulait la formule.

"- Primarque progenitor at Tuus glorium - portant un poing sur son plastron.

- Et glorium Eius in Terra - lui répondit le champion selon la formule consacrée.

- Que m'amène-tu Markus ?

- Le chef de cette bande de dégénérés. Son armure le marque comme un officier supérieur, si tant est que le terme 'officier' ait le moindre sens chez les Night Lords. Nous l'avons acculé avec mes hommes et l'escouade du sergent Albus. Il s'est abrité derrière ses subordonnés mais n'a pas eu l'occasion de nous filer entre les doigts."

Reinhardt observa un court instant la dépouille. En d'autres temps, en d'autres circonstances, il aurait honoré un chef ennemi tombé au combat.

"Jetez les dépouilles avec les autres. Nous avons nos ordres : la Legio Astraman s'approche du site de débarquement des Traîtres. Un titan de classe Warmaster se dresse entre nos Titans et leur cible : l'Imperus Nox. 

Le Seigneur Castellan a ordonné une opération au sol. Voyons si nous pouvons ajouter un Titan à notre tableau de chasse !"

Chen Wu, chapelain de la 8e compagnie des Imperial Fist, surveillait les étendues de Yedig depuis le parapet du bastion. Le piège du Castellan avait fonctionné.. en partie seulement. C'était sans compter sur la férocité et la rage de vivre des Traitres. Kieergrad a été parmi les premiers à tomber, terrassé par un coup en traitre d'un officier de la VIII.. Si tant est que l'on puisse parler d'officiers parmi ces brutes. Ils n'ont jamais vraiment adhéré aux idéaux de la Grande Croisade, et cette guerre n'a fait que le mettre en exergue.

Après la mort de Kiergrad, Wu s'est retrouvé commandant par intérim des forces Imperial Fists opérant aux abords du Terminal Atlas, une promotion de terrain qui fut confirmée par Reinhardt Valens lorsque celui-ci parvint à s'extraire des combats dans la Cuvette du Shaitan. 

En récompense de ses bons et loyaux services, il a été envoyé à l'avant-poste Aleph-Rho, surnommé "Adamant" par les hommes. Situé à l'extrême nord-ouest du Mur, Adamant est un avant-poste doublé d'une plate-forme logistique qui permet de surveiller les Etendues de Yedig, les abords de l'Atlas ainsi que de lancer des opérations vers l'Abime d'Anlok et les montagnes de Vorhek. Si d'autres légions moins disciplinées auraient vu cette assignation peu glorieuse comme une insulte, Chen Wu est un Imperial Fist, et il sait qu'accomplir son devoir est un honneur en soit.

Ainsi, il attend. Il entends le cliquetis lourd des tourelles automatisées qui surveillent le périmètre, le vrombissement sourd du générateur de boucliers voids, les appels des Auxilias humains qui ont été assigné pour renforcer sa force d'Inductii et le bruit des chenilles de ses escadrons blindés. Retranchés derrière leurs fortifications, ses soldats devraient théoriquement être en mesure de repousser ou retenir la plupart des assauts, ou voir venir de loin ce qu'il ne pourraient pas arrêter. Du moins, c'est la théorie.

Ainsi, il observe.

Ses yeux altérés se fixent soudain vers un mouvement à l'ouest : un nuage de poussière. Commun dans la situation actuelle où tant de troupes bougent. Ce qui l'est moins, c'est la direction dans laquelle ce nuage se déplace : droit vers Adamant.

Chen Wu sort de sa méditation silencieuse et se met à donner des ordres alors que les sirènes d'alerte se mettent à hurler.

Adarus, consul-capitaine des Imperial Fist, fixait le fond de la salle du trône. A sa gauche, la forme massive d'Evander Garrius, le tyran de Cthonia engoncé dans son armure terminator, faisait les cent pas, visiblement agité. A la demande d'Adarus, l'entrevue s'était déroulée en huis clos, et les Huscarls et aides de camps habituels avaient été congédiés. La strategos Alyssa Vayne avait été la dernière à quitter la pièce, non sans un regard inquisiteur et teinté d'appréhension en direction d'Adarus et du Tyran. Celui-ci pris enfin la parole, sa voix grave e chargée de menace rompant le silence qui n'avait que trop duré.

"Vous oubliez votre place, consul-capitaine. Ces soit-disant Vrais Fils n'ont que ce qu'ils méritent. Ils ont tourné le dos à toutes nos valeurs, renié tous leurs serments. Ils ont apporté les Word Bearers avec eux, et celà leur a explosé au visage. Nous n'attendrons pas qu'ils "règlent le problème" et qu'ils se regroupent. Ou avez-vous oublié qu'ils sont l'ennemi ?"

Garrius vint se planter devant l'officier Imperial Fist, le foudroyant du regard.

"Ou est-ce que c'est encore cette histoire de serment ?"

A ces mots, Adarus se tend. Pour d'autres, le changement de posture aurait été imperceptible, mais Garrius est un astartes, et un astartes qui le connait bien de surcroit. Le colosse lève une main gantée et la pose d'une manière qui se veut amicale sur l'épaulière d'Adarus.

"-Vous avez fait ce serment à Maral Lupus des Luna Wolves. Les Luna Wolves n'existent plus. Votre serment est caduque. Réjouissez-vous, Adarus : plus rien ne vous empêche d'accomplir la volonté de Dorn.

- Est-ce Dorn qui nous a ordonné de bafouer l'édit de Nikaea ? rétorqua Adarus, incapable de se retenir. Immédiatement, le visage et la poigne de Garrius sur son épaule se durcirent.

- Notre père m'a ordonné d'empêcher les Traîtres de reprendre Cthonia et m'a confié des armes pour ce faire. Ce qui est "bien" ou "mal" ne m'intéresse pas, Adarus. Ces concepts sont aussi changeants que le vent. Le devoir... Le devoir est immuable. Quelles que soient les circonstances. Les Traîtres sont à nos portes, et ils sont plus nombreux et mieux armés que nous. Alors, si je dois sacrifier jusqu'au dernier Titan.. Si je dois conscrire toute la population de ce monde.. Vider nos réserves de phosphex et faire appel à la sorcellerie des Thousand Sons pour m'assurer que les Traîtres payent leur petite rebellion jusqu'au dernier... Ainsi soit-il. Mon devoir sera accompli. Tous les fils de Dorn devraient penser de même.. Qu'en dites-vous.. consul-capitaine ?"

La question sonnait comme une menace, mais Adarus soutint le regard de Garrius.

"- Si les Word Bearers parviennent à réitérer leur petit tour de la Cuvette, ils peuvent encore s'assurer que nous perdions tous. Je ne demande qu'une petite force pour nous assurer que les Vrais Fils terminent le travail avant que nous ne nous occupions d'eux.

- Les Word Bearers ne sont plus une menace. Sul Kontep m'a assuré qu'il n'y aurait plus de démons à la surface de Cthonia.

- Et si il a tort ?

- Assez ! beugla soudain Garrius, sa patience épuisée. Vous ferez comme on vous l'ordonne, consul-capitaine ! Rejoignez vos hommes et préparez-vous. Nous marcherons bientôt sur les Vrais Fils, et vous serez à la pointe de l'assaut. Vous qui vous vous souciez tant de votre vieux serment et de mener cette guerre de manière civilisée et honorable - Garrius cracha presque ce dernier mot. vous aurez l'occasion de vous en assurer. En personne."

La discussion était terminée. Adarus restait un fils de Dorn et il ne se soutrairait pas à son devoir, quoi qu'en pense Evander Garrius. Il salua son supérieur avant de quitter la salle, les sourcils froncés et l'air pensif.